La créativité en tant qu’état d’esprit

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La créativité s’apprend et se développe. Mais d’abord, il faut être dans le bon état d’esprit, ce que la Factry appelle “la posture créative”.

“Tout le modèle pédagogique de la Factry repose sur le fait que la créativité, ça s’apprend, ça se développe, à partir d’une posture, de sa disposition interne”, résume Joëlle Sarrailh, directrice expérience pédagogique à la Factry.

“La créativité peut se travailler de plein de façons : on peut apprendre des techniques de créativité, on peut aussi créer un environnement qui favorise l’émergence des idées, mais avant tout, on peut développer sa posture créative. La posture créative est pour nous la base pour atteindre le plein potentiel créatif”, reprend-elle.

Ainsi, la Factry a mis au point une expression qui lui sert en quelque sorte de devise : adopter une posture créative.

Pour définir le concept, l’école s’est basée sur la littérature scientifique. Dans le livre Psychologie de la créativité, écrit par Todd Lubart, professeur de psychologie à l’Université Paris-Cité, la créativité est une pièce centrale du fonctionnement de l’humain. Et elle s’apprend.

La Factry a nommé les six pratiques essentielles à maintenir la posture créative. C’est en s’entrainant à les pratiquer qu’on apprend à voir les choses sous différents angles, et qu’on atteint plus facilement un état d’esprit d’ouverture aux changements d’où les idées émergent.

1. Embrasser l’inconnu
N’essayez pas de tout contrôler. Apprenez à tolérer l’ambiguïté et à faire preuve de flexibilité face aux imprévus.

2. Avoir les mains moites
N’ayez pas peur de vous tromper ou de faire des erreurs. Le stress est normal, ne le laissez pas vous intimider.

3. Explorer l’inexploré
Accordez-vous le droit d’être curieux.se et d’être à la recherche de nouvelles expériences.

4. Jouer le jeu
Jouez. Amusez-vous. Permettez-vous des associations que vous ne feriez pas habituellement.

5. Être sur son X
Soyez sur votre X. C’est ce qui nous stimule, nous pousse à s’investir et nous donne envie de faire quelque chose de grand.

6. Briser une règle
Osez la nouveauté et l’inattendu. Ne répétez pas ce qui est connu ou ce qui existe déjà. Pour sortir de nouvelles idées, il faut prendre un nouveau chemin.

Selon la Factry, la personne qui “embrasse l’inconnu” possède une tolérance à l’ambiguïté et une capacité d’avancer dans un processus, même si elle n’a pas toutes les réponses. Celle qui “explore l’inexploré” est curieuse. Celle qui “joue le jeu” se met dans un état d’esprit optimiste, donc forcément plus créatif. La personne qui “brise une règle” n’a pas peur de remettre en question l’ordre établi, le business as usual. Celle qui a les “mains moites” peut prendre des risques. Finalement, celle qui est “sur son X” a la capacité de trouver ce qui la stimule et l’allume.

Au quotidien, la posture créative peut se manifester de diverses manières. Par exemple, il pourrait s’agir de choisir un endroit inhabituel pour faire une réunion (jouer le jeu), de poser davantage de questions (explorer l’inexploré), ou alors d’essayer de dire plus souvent “oui” plutôt que “oui, mais” (embrasser l’inconnu).

Bref, pour avancer et relever des défis professionnels, il faut avoir la bonne attitude. “Si tu essaies de réfléchir à un problème dans une posture de fermeture, de pessimisme et en y voyant toutes les contraintes possibles… les idées qui en ressortiront en prendront surement un coup!”. C’est pour cette raison que la posture créative est essentielle à la créativité”, soulève Joëlle Sarrailh.

À la Factry, en plus d’être enseignée explicitement aux clients, notamment dans des lunch and learn, la posture créative est enchâssée dans toutes ses pratiques pédagogiques. “Tous les moments de nos formations sont des opportunités de développer ta posture créative : dans les pauses sous forme de marche exploratoire, dans le brise-glace sous forme de jeu, dans le lunch en mode collaboratif, dans les défis qui t’invitent à prototyper rapidement une idée, etc.”, dit-elle.

Cet état d’esprit se retrouve un peu partout à l’École de la créativité, qu’il soit nommé ou non.

Évaluer l’impact des formations

Dans ce contexte, la Factry a mandaté la Société des demains, un organisme qui se spécialise dans la prospective, de développer un modèle pour mesurer les répercussions de ses formations sur la créativité de ses clients.

“L’idée, c’est d’évaluer l’impact des formations de la Factry dans les organisations, mais surtout sur l’utilisation de la créativité dans ces organisations. Donc comment le passage de la Factry donne des résultats dans leurs processus”, explique Catherine Mathys, cofondatrice et associée à la Société des demains.

Des résultats qui s’appliquent “sur la durée” puisqu’on ne “devient pas créatif du jour au lendemain”, souligne-t-elle. “Ce sont des mécanismes qui se mettent en place. Notre modèle impose un suivi, une présence de la Factry sur la durée”, poursuit-elle.

L’été passé, l’organisme a ainsi fait une revue de la littérature sur la créativité et a rencontré des clients de la Factry pour voir si les connaissances avaient été appliquées à l’interne. “Ils nous ont parlé de ce que ça leur a apporté, de la manière dont ils ont vécu cette expérience et ce qu’il en reste”, explique Catherine Mathys.

Parmi ces clients : des manufactures, des villes, des ministères, des organismes à but non lucratif… Bref, des clients “qui ne sont pas forcément ceux auxquels on s’attend”, souligne-t-elle. “La créativité n’est pas l’apanage des boîtes de publicité, par exemple, et c’est ça qui est intéressant. Le postulat de la Factry c’est que tout le monde bénéficie de la créativité. Ce n’est pas limité aux compétences artistiques”, explique Catherine Mathys, qui est aussi chroniqueuse à Radio-Canada.

Pour elle, la posture créative est un “terreau fertile” pour la créativité, qui permet d’aborder l’inconnu et les nouvelles idées avec ouverture. “C’est une manière dont on se présente dans une équipe, une organisation. Est-ce qu’on est ouvert à explorer une nouvelle manière de faire ? un changement ? Bref, c’est la phase préparatoire”, dit-elle.

“On ne se jette pas habillé dans une piscine”, illustre-t-elle.

Au quotidien, adopter une posture créative pourrait se manifester dans un geste qui nous sort de notre zone de confort. “Il y a une entreprise avec laquelle on a toujours voulu travailler ? On lui lance une perche. On essaie une activité qu’on a toujours voulu faire. On aborde un inconnu. Ça peut être très, très simple”, note-t-elle.

La posture créative est d’ailleurs essentielle pour sa propre organisation, la Société des demains, qui œuvre à élaborer et à explorer des scénarios plausibles du futur. Ou, dans ses propres mots, “à utiliser le futur pour mieux composer avec le présent”.

“Nous aussi, on a besoin de cette posture créative pour s’imaginer dans certains avenirs possibles. Quand on lance un exercice de prospective, on peut être pris dans les contraintes du moment. Mais quand on adopte une posture créative, on se libère de ces contraintes”, dit-elle.

Pour l’associée à la Société des demains, la créativité et la posture créative seront essentielles dans les années à venir. Dans un contexte de transformation technologique accélérée et de perpétuels changements, elle estime qu’il faut être créatif pour tirer son épingle du jeu dans le marché du travail.

“Des changements, on en vit de plus en plus. Il y aura d’autres pandémies, d’autres bouleversements, et chaque fois, ce qu’on a tenu pour acquis va être remis en question. Notre capacité à revoir les modèles, à s’adapter, à répondre à de nouvelles questions va dépendre de nos compétences créatives”, poursuit-elle.

Laurence Niosi

Journaliste